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Chambre #1619

Publié le par Grégory Parreira

 

©Thierry Carrier

 

Muriel Carrupt, Virginie Delahaie, Marie-Thérèse Peyrin, Régis Evellier, Ysabelle Voscaroudis, Sophie Rousseau, Roland Dauxois et moi même avons composé des textes sur l'univers pictural de Thierry Carrier en vue du finissage de son exposition "Sanctuaires" à la galerie Catherine Mainguy (69001). La lecture donnée le samedi 11/11/17 tournait autour du thème de la chambre d'hôtel. Voici le premier des deux textes que j'ai composé pour l'occasion. Je publierai le second jeudi. Bonne lecture !

Lien vers la galerie ---> Galerie C.Mainguy

Lien vers la page FB de l'artiste ---> Thierry Carrier

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Lui, l’anomalie, un pavé dans mes rouages,

Lui, la grosseur inerte, effroyable échouage

D’une matinée. A l’arrêt mes mains aveugles,

Dans mon ventre -en silence- un monde entier qui beugle,

Qui cède au hoquet d’un cri en gestation.

Moi je ne suis qu’une ombre, une incantation,

Une planète qui spirale en continue

Son orbite infinie -un automate nu

qui remet à zéro avec assiduité-.

Je m’empare au matin des ruines tourmentées

Qu’ils me laissent. Fatras dans ma géométrie :

La grimace des draps, l’éclat des boiseries,

Différentes façons de modeler les heures.

Je vois tout ! Les amants, les aubes en sueur,

Les tissus enroulés au poids des insomnies,

Les lettres déchirées, les mots indéfinis

Au fond de la corbeille. Un oubli, un objet

-Parfois- comme une borne au milieu du trajet.

Dans la douche une flaque, une projection

D’eau, les stigmates d’un parfum, sédition

Des paillettes de barbe enlisées dans la mousse.

Qu’importe les ennuis, l’ivresse ou les secousses

Qui pullulent la nuit au creux de ces espaces

Je remets à zéro ! J’anéantis, j’efface !

Et indéfiniment comme une auguste loi

C’est le même tableau qui renaît sous mes doigts :

Un désert de coton à la trame tirée

Sur une lande de moquette évaporée,

Le zèle immaculé d’un morne paysage

-Une page livide où poser ses bagages-.

Mais lui ne devait pas être là, le sommier

Renvoyait au plafond ses rides anémiées ;

Torsions sur les draps comme une éclaboussure

De douleur. Fluides de bouche à même la tête.

L’odeur de calme plat juste après la tempête.

Et la lave, en rouleaux d’épaisses couvertures,

Globules de sang lourd froncés de meurtrissures.

Tout le lit traduisait la foudre d’un instant :

L’écarlate parure et les songes flottants,

Le silence, l’écueil, la lutte de celui

Qui désormais gisait dans l’éclat de sa nuit.

 

Lyon, 8.11.17

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